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"Quand je fais une composition de peinture, c’est comme si je composais une musique" A.A

Malgré son jeune âge, Arthur a su trouver en peu de temps un univers bien à lui. A l’aide du personnage de Mundo qu’il s’est réapproprié, il donne à voir des scènes de la vie quotidienne dans lesquelles chacun peut se retrouver. Si elle est sa passion, la peinture n’est pas pour autant son seul moyen d’expression. Avec lui KASBAH est revenu sur la manière dont il a trouvé sa voie. Renkontre avec Arthur Amrouche.

Peux-tu te présenter rapidement ?

Arthur : Je m’appelle Arthur Amrouche. J’ai 21 ans. J’ai fait une Licence d’Arts Plastiques à la Sorbonne. Je suis artiste : je fais de la peinture et un peu d’animation. L’animation ça va être ce que j’ai déjà fait avec les boucles, des court-métrages ou encore des clips. Tout ça en format dessin- animés. J’ai fait une expo il n’y a pas très longtemps, le 3 novembre, dans une galerie qui s’appelle l’Espace Sylvia Rielle à Paris. J’ai pu mettre en relation mes différentes pratiques. J’ai fait une projection de mon animation et il y avait aussi mes peintures. A terme j’aimerais bien mélanger encore plus de choses. Mon but dans la vie c’est vraiment d’apprendre un maximum de pratiques. Là je vais essayer de travailler le textile, faire des vêtements. J’aime aussi la musique. J’essaie de toucher à tout.

Quand tu parles de textile, tu penses te lancer avec quelqu’un ou tu penses t’y attaquer seul ?


A : Je vais faire ça « par moi-même ». J’ai envie d’y mettre un pied tout seul d’abord. Comme ça je connais les tenants et les aboutissants avant de collaborer avec une marque par exemple.

Tu te souviens de ta première rencontre avec le dessin et la peinture ?

A : Depuis que je petit je suis très créatif. On ne m’a pas inscrit dans des cours de dessins, il n’y a personne qui m’a poussé à dessiner. Mais j’imaginais beaucoup de choses. Je poussais les idées vachement loin. Par exemple quand je jouais avec des legos, j’imaginais des univers de fou. Après je prenais un grand carnet et je notais tout. Après durant tout le collège, j’ai toujours un peu dessiné. Je pense que le moment où je me suis dit que j’allais vraiment m’y mettre c’était à peu près début lycée. Je n’étais pas très bon à l’école à ce moment là. Mais j’ai capté que je pouvais faire un truc avec le dessin. Au départ je voulais faire des écoles privées d’art appliqué sauf qu’on n’avait pas assez d’argent. A la fin de la terminale, j’ai été recalé de tous mes vœux Parcous Sup. Alors j’ai fini en fac. Finalement c’était une bonne chose. Dans le sens où je préfère le champ des arts-plastiques. Je préfère imaginer tout mon truc et pas forcément travailler dans un studio. Aujourd’hui, avec la direction dans laquelle je vais, je suis libre de faire ce que je veux.

A quel moment tu as senti que tu étais fait pour le dessin et la peinture ?

A : C’était quand j’étais en cinquième. J’aime beaucoup les jeux vidéos. J’adore ça. J’avais fait un dessin d’un de mes jeux vidéos préférés et j’étais vraiment fier. Je me souviens, je l’avais montré à mon prof et il avait kiffé. La peinture c’est venu quand je suis arrivé à la fac. Aux alentours de 2018. Je dessinais énormément les gens dans le train. J’ai beaucoup de carnets comme ça, avant que je fasse mon personnage Mundo. Je les colorais à l’aquarelle.

J’ai commencé avec la peinture à l’huile pour m’entraîner. Je suis parti dans l’idée de maîtriser un peu tout. Mais je garde quand même dans mes œuvres un côté très graphique, très dessin. Ça se rapproche un peu de la BD. Là je me cherche encore. J’ai pas fini de chercher. Là je cherche une transition vers un autre medium. J’essaie de faire plusieurs tailles parce que les travaux que j’avais présentés à l’expo ont encore quelques trucs à améliorer.

Tu parlais de peinture à l’huile, d’aquarelle. Pour ce qui est de la technique : tu as appris en autodidacte ou tu as pris des cours ?

A : J’ai appris l’aquarelle vraiment tout seul. Ça a duré assez longtemps. L’huile c’est un peu pareil dans le sens où en fac d’art il n’y a aucun prof qui va t’apprendre à peindre. Les profs ne nous apprenaient pas la technique mais plutôt les points théoriques. Comment présenter son travail, etc. Je suis bien sûr aller scruter des tutos sur internet. Pour l’animation pareil : j’ai appris tout seul. Ces derniers temps comme je cherche des conseils un peu plus spécifiques je vais demander à des gens.

Pour que tu te lances dans l’art, est-ce que tu as été inspiré par des personnes de ton entourage ?

A : Ce qui était pas mal, c’est que j’ai eu pas mal de soutien. Mes parents ils sont sympas. A partir du moment où ils ont vu que j’avais rien d’autre qui me tenait à cœur, ils se sont dit on va le laisser faire. J’ai pas mal de soutien ! Et ce qui est pas mal c’est qu’il y a des gens qui ne me connaissent pas dans la vraie vie et qui m’apportent leur soutien. C’est un truc de fou. Après il y a le soutien qui me booste et il y a l’inverse. Il y a des gens qui ont a cœur de me ramener sur terre. Ça me rappelle l’école. Quand tout le monde voulait qu’on reste à notre place.

Et malgré ce qu’ils te voient accomplir ils persistent à vouloir te ramener sur Terre ?

A : Oui ce qui est bien c’est qu’en face j’ai quelque chose de concret. Et il faut dire que plus le temps avance, plus mes projets grandissent. Surtout depuis le confinement. J’ai pu travailler avec un peintre, ça m’a boosté aussi. Je me suis dit que s’il y a des mecs comme ça qui peuvent tomber sur mon travail, il faut que je continue. De fil en aiguille, mon travail est devenu plus solide. Il a une énergie et je le fais de manière sincère. Je sais qu’il vaut quelque chose et c’est pour ça que je commence à multiplier les projets. Et finalement je comprends le point de vue de ceux qui essaient de me dissuader. S’ils n’ont pas de projets irréalisables, ils ne vont pas comprendre l’intérêt que je trouve à faire des trucs de fou. Ils ne sont pas juste pas accordés sur le même tempo. J’ai réussi à comprendre que tout le monde n’a pas les mêmes points de vue. Dans tous les cas je continuerai.

Tu peux donner des noms d’artistes qui t’inspirent aujourd’hui ?

A : Il y a beaucoup d’artistes « populaires ». Mon inspiration numéro c’est Jojo’s Bizarre Adventure. Ensuite il y a Tsatsuki Fujimoto qui commence à être populaire. J’aime la manière dont il imagine les perso. En terme d’artiste il y a aussi Kanye West... malheureusement. Parce qu’en ce moment il pète un câble. Il faut quand même que je le dise parce qu’il a fait m’a vraiment vraiment impacté. Il a réussi à faire pleins de trucs. Je pense aux Listening Party de Donda. Après je suis très influencé par la musique. Je pense notamment à Stevie Wonder ! C’est fantastique... Ses musiques sont très colorées. Il a une palette tellement large, ses musiques sont touchantes. Il y a une vraie En terme de peinture j’aime beaucoup le travail de Yue Min Ju. Il fait un travail incroyable.


Pour toi il n’y a pas de frontières entre les arts ? Un musicien peut t’inspirer dans ce que tu peins ?

A : En gros quand je fais une composition de peinture, c’est comme si je composais une musique. Tout ce que je consomme artistiquement, notamment la musique, provoque des émotions et je les mets ensuite en images.

Et qu’est-ce que tu consommes le plus comme style de musique ?

A : Notamment du rap américain. C’est ce que j’ai le plus écouté toute ma vie. Mais en ce moment ce que j’aime le plus ce sont les blancs barbus qui vont dans la forêt (rire). Je parle par exemple de Boniver. De James Blake aussi. C’est une super D.A : ils mettent trois bruits pendant dix minutes et ça va me briser le cœur. On n’est pas obligé de maxer pour faire un truc stylé. Et ça c’est un truc de composition global que je n’aime pas. Quand il y a trop de détails. Le truc assez commun à tout ce que je consomme : quand il y a une histoire où on détaille trop de choses. Quand ce sera terminé, il va rester quoi à l’œuvre ? Je pense par exemple à One Piece en ce moment. Il y a trop de détails, trop de choses et pas de place à la réflexion.


Pour revenir à tes peintures, il y a personnage qui revient souvent. Il s’appelle Mundo. Qu’est- ce qui t’a fasciné chez lui pour qu’il revienne dans tes peinture comme ça ?

A : Mundo est tiré de League Of Legends. Un soir je parlais avec un pote sur Insta et j’ai trouvé un PNG de Mundo hyper hilarant. Mundo c’est devenu un peu une blague entre lui et moi. Alors quand je rejoignais mes potes je criais comme Mundo, dans la rue je devenais Mundo... bref ! C’était hilarant. Ce que je trouvais cool c’est que c’était comme si je devenais ma blague. A un moment donné j’avais commencé à le dessiner de manière naturelle. Je me suis dit que ce serait chouette de le dessiner en espèce de masque. J’ai changé la silhouette. Et finalement j’ai pas gardé grand-chose et j’ai mis de côté pas mal de concept que je voulais de base. Comme celui de masque. On ne verra jamais un Mundo qui enlève son masque. Quand je fais des dessins de lui, je me base soit sur un ressenti, soit sur des photos de mes amis, de moi, de ma famille...

Effectivement tes peintures peuvent représenter des scènes de la vie quotidienne. Mais c’est toujours le même personnage, tout le monde a la même tête. C’est inspiré de ce que tu vis ?

A : Ouais toujours ! Avec ce personnage je peux me focaliser sur l’énergie, sur le ressenti. J’adapte un peu la forme (la masse sur la tête, la forme du masque, les couleurs). C’est un outil qui me permet de créer de manière fluide. Ce qui est un design de personnage qui est super flexible. Donc il peut être étiré et ré-étiré... Je peux tout faire avec lui sans avoir la contrainte de dessiner un humain. Je préfère en venir directement au but.

A travers tes peintures quels messages essaies-tu de faire passer ?

A : Ça dépend. Mais globalement dans ce que j’essaie de faire passer ce sont des choses du quotidien. Avant j’aimais beaucoup représenter les gens du train. J’aime voir les choses telles quelles et ce que je trouve encore plus intéressant c’est peut-être la question de l’ego. En gros on a trop tendance à se sentir très différencié des autres, très détaché sauf qu’il y a toujours un moment où il va falloir s’inclure dans une masse. Et ça fait encore plus conscience de qui on est. Tout va me toucher très fort et je trouvais ça bien de mettre ça images. Au moment où je l’ai décidé, mon travail a pris un sens. Avec Mundo je vais venir étendre ces thèmes-là à toutes les problématiques. Comme le personnages est designé comme étant flexible et que je vais me baser sur

ce qui va me toucher, je peux représenter tout et n’importe quoi. Après j’ai pas envie de traiter de sujets de société hyper graves parce que justement c’est là que ça devient bateau.

L’actualité n’est pas intéressante quand on parle d’art ?

A : Ce n’est pas ça. Mais quand je dois traiter d’un sujet, je vais toujours prendre en compte mon point de vue par rapport au sujet. Et pas de manière frontale. Je pense par exemple au jogging de Justin Bieber « racism is evil ». Je trouve ça débile : on le sait. Si je dois traiter du racisme, je vais le traiter à mon échelle. Dans tous les cas je reste un arabe, je l’ai vécu à mon échelle. Que ce soit à mon taff, à l’école ou même dans mon voisinage. Par exemple, je me souviens que quand j’habitais à Lyon, il a une trottinette qui a disparu, et direct ça a sonné chez moi... Ils ont dit à mon père « le voleur lui ressemblait ». Ça c’est un sujet que je traiterai peut-être un jour. Ça m’a touché. Ce sont des sujets puissants.

Pour parler du sujet de l’animation. Tu en as parlé et j’ai vu que tu avais une chaîne YouTube. Comment ça t’es venu ?

A : Le dessin-animé, c’est un des trucs qui me passionnent le plus. C’est peut-être la plus belle manière d’exprimer les choses. J’aime beaucoup les films d’animation : en France on est peut-être les meilleurs du monde. Avec les japonais. Et je trouve ça dommage que les réalisateurs d’animation sont mal considérés. L’autre jour j’ai vu Le sommet des dieux : magnifique. A la fac , j’étais dans cette démarche où je voulais tout apprendre. Alors j’ai taffé et je me suis acheté une tablette graphique et j’ai commencé à faire des animations. C’était à l’époque où je ne dessinais encore que des humais. C’était une extension de ce que je faisais avec les gens dans le train. Dans l’animation, c’est la notion de collaboration qui est cool. Ça fait un moment que je n’ai plus posté grand-chose mais le travail arrive. J’essaie d’adapter mes nouvelles manières de taffer et ma nouvelle manière de communiquer à l’animation. Là par exemple je suis sur un court-métrage. Je vais essayer de faire quelque chose qui me tient à cœur et qui me touche.

En parlant de tes projets à venir, qu’est-ce qui se dessine de concret à part le court-métrage ?

A : Les peintures, toujours. J’ai trouvé mon langage alors je vais continuer de produire des peintures. Dès que je peux, je vais essayer de faire une expo. Sinon pour les vêtements je suis en train de me pencher sur le fait de faire un événement physique. Je pense que les gens sont plus engagés quand il s’agit de venir. J’ai envie de faire une dimension musicale très importante dans mon court-métrage. Un peu comme dans Fantasia.

Quelle est la chose dont tu es le plus fier aujourd’hui ?

A : J’ai la pièce maîtresse de la dernière expo que j’ai faite. C’est sur une série, j’en ai fat quatre, et c’est la dernière. Et avec cette peinture j’ai senti que j’ai franchi un cap. Il y aussi le clip « Pretty Now » et mon album des élections présidentielles. Et mon futur album de Noël...

Si tu devais décrire ton travail en trois mots ?

A : Fouillis, coloré et vivant.

Pour finir, si tu as un conseil à donner à ceux qui hésitent à faire le choix d’une carrière artistique, quels sont-ils ?


A : Créer de manière sincère et pas toujours dans l’objectif de devenir riche. Il faut commencer par créer pour soi, c’est primordial. Quand tu crées pour les autres, tu vas te foirer. Il faut aussi partager son travail, optimiser ses réseaux. Si j’en suis là aujourd’hui c’est parce qu’il y a quelqu’un qui m’a repéré à un moment donné. Et surtout ne pas être opportuniste, ça se sent !


Interview faite par Elodie Gros Désir

1 Comment


Guest
Dec 31, 2022

Voilà une belle définition d'un artiste prometteur qui fait preuve d'une grande maturité artistique

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